Trois axes pour une transition énergétique raisonnée
Entre les appels à passer à un mix énergétique « 100% renouvelables » aussi irréalisable que contreproductif, et les défenseurs d'un statu quo arcbouté sur l'héritage du XXe siècles, quelle stratégie pour une transition énergétique guidée parla science et l'efficacité ?
Entre les appels à passer à un mix énergétique « 100% renouvelables » aussi irréalisable que contreproductif, et les défenseurs d'un statu quo arcbouté sur l'héritage en infrastructures du XXe siècles, quelle stratégie pour une transition énergétique guidée par le consensus scientifique et l'efficacité ?
La politique énergétique de la France ne peut se résumer aux polémiques sur la fermeture de la centrale de Fessenheim ou aux débats comptables sur les EPR. Elle engage notre pays sur 60, si ce n'est 100 ans.
La France doit se tourner vers une transition énergétique raisonnée : nous devons fixer des objectifs beaucoup plus ambitieux qu'actuellement en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre et des pollutions liées à notre production et notre consommation d'énergie, mais y parvenir par une stratégie pragmatique et des moyens guidés par la raison. Nous devons refuser les confrontations binaires autour du nucléaire et des énergies renouvelables, et nous nous baser sur des analyses et des choix scientifiques. De même, une stratégie de transition énergétique raisonnée doit être gagnante pour le pouvoir d'achat, l'emploi et l'indépendance nationale. Les différentes énergies se doivent d’être complémentaire pour répondre aussi bien à l'urgence climatique qu'aux besoins des consommateurs et des entreprises.
La France produisant déjà une énergie très propre, nous devrions plutôt nous concentrer en priorité sur l'efficacité et la sobriété énergétiques, en isolant par exemple les bâtiments qui consomment plus d'énergie qu'ils ne devraient, ou en développant les « smart grids » (réseaux intelligents) décentralisés pour optimiser au maximum notre consommation d'énergie. Mais notre mix énergétique a beau être l'un des plus propres du monde, il faudra à terme le rendre plus durable : cela doit se faire selon un calendrier scientifique, et non politique comme aujourd'hui.
Une stratégie de transition énergétique raisonnée doit distinguer le court, le moyen et le long terme.
Premièrement, pour ne pas mener de politiques contre-productives, à l'instar de « l'Energiewende » allemand, où l'obsession d'une sortie en urgence du nucléaire et d'un développement mal conçu des énergies renouvelables abouti à une augmentation de la pollution et des émissions de gaz à effet de serre (la production des renouvelables est intermittente, non pilotable et non stockable, il faut encore la compléter par la production de centrales moins propres), et à un énorme gâchis financier payé par les contribuables. C'est pourquoi vouloir passer rapidement au « 100% renouvelables » est un objectif louable mais contre-productif pour la planète, le pouvoir d'achat et l'intérêt national.
Deuxièmement, pour ne pas engloutir des montagnes d'argent public et faire inutilement gonfler nos factures d'électricité en misant sur des énergies renouvelables qui seront bientôt remplacées par des solutions plus rentables et plus durables. C'est pourquoi nous ne pouvons certainement pas tout miser sur l'éolien, le solaire et autres ENR actuelles alors que leur rentabilité et leur efficacité devraient s'améliorer dans un futur proche : en attendant, nos efforts doivent se concentrer sur les chantiers évoqués plus haut.
Troisièmement, parce que nous devons faire confiance à l'innovation, et notamment aux chercheurs, ingénieurs et entrepreneurs français : s'il faut financer des sources d'énergie alternatives, nous devons plutôt investir dans la recherche autour de technologies potentiellement beaucoup plus propres et rentables que celles existantes, ou pour compléter celles-ci. A moyen terme, nous pouvons découvrir, améliorer, et généraliser des solutions de stockage ou de pilotage de l'énergie produite par les énergies renouvelables, ce qui les rendra beaucoup plus efficaces, trouver des alternatives satisfaisantes pour tous pour stocker les déchets nucléaires et réduire leur radioactivité. A plus long terme, c'est à dire d'ici quelques décennies, notre pays peut contribuer à la réussite de la plus grande révolution énergétique depuis la découverte de l'électricité : la maîtrise de la fusion nucléaire, qui nous garantirait une énergie plus propre et quasi-illimitée, ce qui permettrait aux prochaines générations de relever d'immenses défis, de répondre à la demande croissante en énergie tout en maîtrisant la pollution ou les émissions de gaz à effet de serre.
Voici que ce pourraient être la stratégie et les objectifs à court, moyen et long terme pour une transition énergétique raisonnée, qui fasse de la France l'un des leadeurs mondiaux de l'énergie propre tout en renforçant notre compétitivité, notre industrie et notre pouvoir d'achat.